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Le déni : Bernard Glassman


Enfin, j'aimerais parler de ce qui est à l'opposé du témoignage : le déni. La meilleure histoire de déni que je connaisse concerne le fondateur du bouddhisme, Shakyamuni Bouddha dans sa jeunesse. Quand le Bouddha est né en Inde, il y a environ 2 500 ans, un grand prophète a prédit à son père, le roi de la tribu des Shakya, que son fils serait soit un grand roi qui unifierait toutes les tribus indiennes sous son joug, soit un grand guide spirituel. Le roi souhaitait que son fils fût un grand roi plutôt qu'un guide spirituel, et ainsi, après la naissance de l'enfant, il le maintint à l'intérieur d'un palais magnifique. Le palais offrait tout ce que le prince pouvait désirer, tout le confort et tout le luxe que le monde pouvait offrir. En revanche, les malades et les vieillards n'étaient pas admis dans l'enceinte, et le prince n'avait pas la permission de franchir les murs du palais. Il grandit, se maria à une princesse d'une grande beauté dont il eut un fils. Mais il était de plus en plus tourmenté : il voulait voir ce qui se cachait derrière les murs du palais. Finalement, il persuada un conducteur de char de l'emmener en secret un soir à l'extérieur du palais. Cette première nuit, ils rencontrèrent un homme malade allongé sur la route. Le jeune prince n'avait jamais vu pareille chose et demanda au conducteur de char ce que c'était. Le conducteur de char répondit : "Ceci est la maladie". Ils revinrent au palais et le Bouddha pensa à ce qu'il avait vu. La nuit suivante, il persuada le conducteur de char de l'emmener une fois encore à l'extérieur. Cette fois, ils rencontrèrent sur le chemin un vieil homme. Le Bouddha n'avait jamais rien vu de tel et demanda au conducteur de char ce que c'était. Le conducteur de char répondit : "Ceci est la vieillesse." Une fois de plus, ils retournèrent au palais et le Bouddha réfléchit à ce qu'il avait vu. La nuit suivante, ils sortirent à nouveau. Cette fois, ils rencontrèrent un homme mort. Le Bouddha demanda ce que c'était, et le conducteur de char répondit : "Ceci est la mort." De retour au palais, le prince était accablé : jamais auparavant il n'avait été confronté à la maladie, à la vieillesse et à la mort. Son agitation grandit, et les choses qui lui procuraient jadis du plaisir étaient dorénavant dépourvues de sens. Il voyait son existence pour ce qu'elle était, une vie derrière des murs. Ce qu'il avait aperçu avait provoqué en lui des questions qu'il ne s'était jamais posées et il ne savait pas comment y répondre. Il supplia une dernière fois son conducteur de char de le faire sortir du palais. Cette fois, ils virent un moine mendiant. Le Bouddha lui demanda ce que c'était. Le conducteur de char expliqua que c'était un chercheur spirituel qui avait renoncé au monde afin de découvrir le sens de la vie. Le prince retourna chez lui. Il savait à présent ce qu'il devait faire. Une nuit, après que tout le monde fut parti se coucher, il quitta le palais. Dans la forêt, il retira ses vêtements royaux, ses bijoux et son épée. Faisant disparaître toute trace de son ancienne identité, il revêtit les guenilles d'un mendiant.

C'est une histoire de déni. Cela ne concerne pas seulement le père du Bouddha, mais tous les pères et mères qui cherchent à éviter à leurs enfants le contact avec la misère et la douleur. Quand leurs enfants deviennent adultes et qu'ils sont confrontés à ces phénomènes dans leur propre vie et dans celles des autres, ils ne savent que faire, et ils détournent leur regard. Notre société aimerait nier l'existence de ce que le père du Bouddha avait souhaité dissimuler à son fils. Nous nous détournons ainsi des sans-abri, des alcooliques, des pauvres, des malades, des mourants, des mendiants. Comme le prince, nous vivons derrière des murs qui nous cachent la vue de ce que nous ne souhaitons pas voir. Pour les voir, il nous faudra aller au-delà de ces murs.

Dans l'Ordre zen des Peacemakers, notre pratique consiste à témoigner au lieu de nier, à élargir notre vision, à écouter plutôt qu'à donner des leçons. C'est une pratique sans fin que nous approfondissons continuellement, qui commence et se poursuit lorsque nous nous ouvrons à l'inconnu. Nous ne portons pas témoignage pour dire aux autres ce qu'ils doivent faire de leur vie. Après de longues années d'études, d'enseignement et d'actions en faveur de la paix, j'ai réalisé que j'étais plein d'illusions, que je le serais toujours, et que je n'arriverais jamais à un point ultime de savoir. Par conséquent, j'ai décidé de m'ouvrir à l'inconnu et de ne jamais cesser de porter témoignage. Et cela signifie : lâcher prise, porter témoignage, lâcher prise, porter témoignage, lâcher prise – à jamais.


Bernard Glassman, L'Art de la paix, Paris, Albin-Michel, 2000, pp. 95-97, traduction de Joa Scetbon-Didi. Reproduit avec l'aimable autorisation des Éditions Albin-Michel. Reproduction interdite. Photographie © Peter Cunningham.

Photographie : Bernard Glassman


Sur le site on lira également :

Une rencontre avec Bernard Glassman, "clochard céleste", un texte de Fabienne Delpy
La spiritualité engagée de Bernard Glassman, une interview de Bernard Glassman réalisée par Ursula Gauthier
Les trois purs préceptes et Bodhidharma, une causerie de Bernard Glassman


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