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Les digressions d'avril 2004

IMAGES NUMERIQUES EN SUSPENSION

Une interview de Jacques Levant, artiste du possible


BodhidharmaEn quête d'un art nouveau, Jacques Levant explore les diverses possibilités de l'art numérique. Ses dernières compositions sont des suites d'images retravaillées sur ordinateur qu'il imprime sur des bandes transparentes suspendues dans l'espace. Ces suspensions forment un poème numérique, reflet à la fois de l'angoisse et de l'espérance qu'offre le monde contemporain.

[Télécharger et imprimer l'interview au format pdf]


Sur la toile : Le site de Jacques Levant http://www.artposter-meditation.com.



SuspensionQ. Jacques Levant, comment travaillez-vous ?

R. Je travaille à partir de différentes images, des photographies que je prends moi-même, d'autres que je réutilise, des images captées sur la télévision, par exemple. Je les retravaille et les sélectionne pour former une suite que j'imprime sur un film transparent. Elles sont ensuite montées et suspendues. Chaque bande est unique bien que je les réduise également sous la forme de petits livrets dépliables tirés à deux exemplaires. Des traces. Ces bandes sont suspendues et non pas plaquées contre un mur pour laisser jouer la lumière dans la transparence. J'imagine une exposition où les spectateurs pourraient évoluer à l'intérieur d'une pièce remplie de suspensions, qu'ils se laissent happer par les images.


Q. Comment choisissez-vous les photographies ?

R. Les images ne sont évidemment pas gratuites, certaines ont une connotation positive, elles sont le reflet de la beauté, de l'amour, ce peut être un sourire, une œuvre d'art ; d'autres sont négatives, ce sont des images de destruction et de pollution. Sur certaines bandes, il y a des arbres calcinés, des souches brûlées, que j'ai photographiés en Corse. Dans sa brûlure même, l'arbre devient symbolique. Mais j'aime aussi montrer la beauté sous des formes variées. J'associe des photographies différentes, des photos de foules, d'autres représentations artistiques également, une pietà, une peinture de Lascaux - l'art est déjà à l'origine du monde - un tag, un Giacometti. Je ne fais pas de différence entre un art soi-disant noble et un art populaire. Toutes ces images s'interpénètrent pour former un seul tout.

C'est un subtil mélange qui indique un moment d'hésitation, notre temps présent. Nous sommes aujourd'hui dans l'incertitude, nous vivons à une époque charnière, entre l'espoir et le désespoir des temps futurs. En quelques années, nous avons quitté le monde des certitudes, qu'elles soient philosophiques, religieuses, politiques ou même scientifiques, l'avenir nous paraissait alors plus humain. Tout cela s'est effondré. Chacun le ressent aujourd'hui très fortement.

L'artiste est toujours situé dans une époque, qu'il en soit conscient ou non, il en est l'émanation. Le temps s'accélère, l'art aussi. Beaucoup d'artistes cherchent par différents moyens, les installations, les performances, le numérique, à capter cette incertitude dans leur travail. Le numérique et le travail sur ordinateur me permettent d'être au cœur de cette incertitude. Je suis un témoin.


Q. Ces images ne sont pas sans rappeler des calligraphies chinoises suspendues. Une succession d'idéogrammes, des images pictographiques, dont l'ensemble forme une phrase.

R. Oui mais, il ne s'agit pas d'une phrase, mais d'un poème. Un poème numérique. Chaque image est influencée, et vit au travers des images qui sont autour. C'est le tout qui m'importe. C'est l'ensemble qui va susciter l'émotion.


Q. Est-ce un travail sur l'angoisse ?

R. D'une certaine manière, oui, mais ce n'est jamais une vision du néant. Si je montre l'inquiétude, je montre également la quiétude. Certains artistes contemporains sont entièrement tournés vers la dérision et le désespoir. Puisque rien n'est rien, autant simplement jouer d'une manière ludique avec des formes sans signification. Mais l'œuvre d'art doit avoir un sens. Sans espoir, même ténu, il ne pourrait y avoir d'art.

Ces suspensions sont dans un équilibre et comme tous les équilibres, il est instable. Mon travail est sur l'entre-deux du monde actuel, il porte en lui tous les possibles de la création et de la destruction. Ces suspensions sont un reflet, un appel, comme une prise de conscience du temps présent qui est, lui aussi, en suspension.

Si je faisais un travail serein, aérien et pur, je serais en dehors de ce temps présent. L'artiste est comme une plaque sensible sur laquelle s'exprime le monde tel qu'il est à son époque. Il ne doit pas tricher. Il y a une vérité, une authenticité, lorsqu'il est véritablement ce reflet. À chaque époque, sa forme d'art. Le monde se cherche, l'art se cherche. Aujourd'hui, on peut évidemment peindre comme Rembrandt, mais la profondeur de l'époque, elle, n'est pas reproductible. L'art est toujours d'époque, mais lorsqu'il touche la profondeur, il atteint l'universel et traverse les siècles.


Q. Comment en vient-on à l'ordinateur ?

R. Dans mon travail d'artiste, j'ai successivement expérimenté la plupart des formes d'art contemporaines. J'ai d'abord commencé par peindre voici une trentaine d'années. Ce fut d'abord la peinture gestuelle où l'on jette plus qu'on ne peint, à la recherche de l'impulsion, de l'authenticité. Puis mon travail a évolué vers la peinture géométrique puis vers d'autres styles, et notamment le land-art. J'ai toujours voulu explorer. Il y a une vérité dans la découverte. Mais dans la découverte, il faut savoir être lucide. Savoir quand on explore le moment et à quel moment on l'exploite. J'ai toujours avancé jusqu'à cette rencontre avec l'ordinateur qui devient l'outil artistique des possibles.

L'artiste doit s'appuyer sur le passé, sur les différentes formes d'art, les expérimenter, en même temps, il doit porter l'art autrement.

VeilleJ'aime cette anecdote. Un maître zen fait une cérémonie en l'honneur de son maître défunt. À la fin, les disciples l'entourent et lui demandent :
"- Qu'avez-vous retenu de l'enseignement de votre maître ?"
Et il répond : "- J'en ai gardé la moitié, j'en ai jeté la moitié."
Les disciples sont un peu interloqués et disent :
"- Pourquoi n'avez-vous pas tout gardé ?"
Et le maître a cette belle réponse :
"- C'est en gardant tout que j'aurais été indigne de lui."

À chaque fois, on doit amener quelque chose de soi, si on ne fait que reproduire, il n'y a plus rien de vivant.


Q. Vous évoquez une anecdote zen, dans vos premières créations numériques, vous placiez côte à côte des images de déchets et de personnages en méditation dont vous disiez qu'ils étaient "en veille".

R. La découverte du zen a été l'une des grandes joies de ma vie, mais je ne suis pas un artiste zen. Ce personnage méditant était l'image d'une humanité en réflexion, en attente, qui faisait le contrepoint de ces images de pollution. Mais aujourd'hui, je n'en ressens plus la nécessité. Nous sommes tous dans l'attente. En même temps, c'est dans les périodes de transition que le bouillonnement est le plus intense. Quelque chose va naître. J'en suis persuadé.

Reproduction interdite.


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